Gravure ancienne montrant l'entrée d'un terrier.

Dans la catiche

La face mal cachée de la Loutre


Colère

Temps de lecture estimé : 5 minutes

(CW évocation de pédocriminalité et d’abus)

J’essaie, autant que faire se peut, d’être légère, amusante, distrayante. J’essaie, malgré mon évolution féministe, d’être la « manic pixie dream girl » que la société a réussi à faire de moi. Je râle, bien sûr. Je me plains, souvent. Mais fondamentalement, j’y reviens toujours.

Sauf quand ça se fissure.

Aujourd’hui, suite à un mini grain de sable, j’ai encore craqué. J’ai vu son pseudo par un hasard total dans une conversation (c’est une faiblesse du fedi : si on suit les réponses sur une autre instance, pour ne rien rater, on se prive de notre liste de block… Allez savoir pourquoi, cette évidence m’avait jusque là échappé). Tremblements, difficultés à respirer, envie débordante de fuir le plus loin possible… Après tout ce temps, hein. Moi qui pensais être presque guérie.

Cependant, ça passe de plus en plus vite. Et c’est déjà une grande victoire, avant il me fallait plusieurs jours pour m’en remettre, sans parler des cauchemars. Maintenant c’est l’affaire de quelques heures, merci de m’envoyer des cookies ! (Les bons, qui se mangent, pas les autres).

Je ne vais pas raconter intégralement ici pourquoi mon « pire ex » (comme les plats) est une telle pourriture, peut-être même qu’on a déjà parlé et que vous le savez déjà. Pour résumer, on est quand même sur un mec qui est un abuseur (physique et mental) pédocriminel (ayant eu un dossier plein de photos de petites filles sur son ordinateur, ce genre de personne) (annonce: recrute hackeur pour simple vérification, merci de me contacter au *KRIIIIIIIIISH*). Pour celleux qui ont envie d’être triste, j’ai récupéré un article que j’avais écrit en 2013 sur un webzine de l’époque (Polyvalence mon Pote), et il est disponible sur cette page avec des annotations récentes : le Gouffre. Je vous préviens, c’est assez dur à lire, donc voilà, préservez-vous si besoin. Je parle ici de trigger, alors autant ne pas vous en provoquer au passage, ça ne serait pas très malin !

Bref, en résumé, pas une très bonne personne (et le prix de l’euphémisme de l’année est décerné à….)

Il se trouve quand même que j’ai vu une chose très amusante, il y a quelques années maintenant. Une chose qui m’a totalement sidérée. Le mec a été interviewé dans un, heu, magazine « féministe ». En tout cas, qui se revendiquait féministe, parce qu’entre nous on sait que c’est n’importe quoi. In. Cro. Yable. Le toupet. Je ne vais pas spécifier les raisons, mais après tout pourquoi un mec lambda, progressiste, de gauche, n’aurait pas droit à un petit article dans un magazine pour le féliciter d’être simplement aussi formidable. N’est-ce pas.

On m’a dit il y peu, et avec bienveillance, « on dirait que tu t’excuses tout le temps d’exister ». C’est vrai, j’en ai conscience. C’est pour ça que je parle trop, que je justifie tous mes choix, que j’ai une peur lancinante du jugement négatif. Et le principal responsable de cet état de fait, loin de s’excuser de quoi que ce soit, vit sa vie en étant tout à fait content de lui. Hé, vraiment. Quelle injustice.

Gérer les traumas, c’est difficile. On peut dire que c’est un apprentissage perpétuel, et chaque exposition aura une issue différente. Un jour je vais m’en foutre, un autre je vais avoir envie de me rouler en boule et de pleurer. Le trigger n’a pas besoin d’être important, le fait de savoir qu’il existe est après tout déjà suffisant. J’aimerais d’ailleurs gérer ces crises comme une meuf solide, me dire que je n’ai besoin de personne, que c’est qu’une question d’heures avant que tout revienne à la normale.

Le hic, c’est que je ne suis pas une meuf solide. Ou, en tout cas, pas tout le temps. Et je m’en veux de lui laisser une telle importance dans ma vie. Cette culpabilité stupide se transforme fatalement en colère, contre moi, contre lui aussi, contre tout un tas de choses.

Le hic, c’est que je m’en veux d’avoir besoin de soutien, parfois, quand ça ne va pas bien. Alors la plupart du temps, j’intériorise.

Le hic, fondamentalement, c’est que je n’ai plus envie d’avoir à être une meuf solide. J’ai envie d’être honnête, et de simplement avoir le droit de dire « ça ne va pas » sans qu’on attende de moi que je sois dure comme la pierre, ou qu’on me reproche de ne pas l’être.

C’est dans cette démarche semi-consciente de simplicité que la parole sort, difficilement au début, puis plus simplement.

Et c’est à ce moment là que, loin de me juger, les gens me soutiennent et sont absolument adorables. Merci, du fond du cœur merci. Aujourd’hui, j’avais vraiment besoin de ressentir cette douceur, pour repousser la colère et l’angoisse. Cette affection qu’on reçoit parfois de gens qu’on ne connait pas vraiment peut arrêter la spirale négative de la réminiscence traumatique et transformer une expérience désagréable en élan d’amour. C’est vraiment pas rien. Bien sûr, je suis toujours en colère. Comment ne pas l’être. L’important, c’est d’intégrer que cette colère ne mérite pas mon temps. Un jour, mec, j’arriverai à ne plus te donner l’importance que tu ne mérites de toute façon pas. Et ce jour est de plus en plus proche.



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